Dans une tribune libre publiée le 9 août 2021 à Yaoundé, le pasteur protestant, Simon Bolivar Njami Nwandi, président de l’Assemblée générale des cadres de l’Union des populations du Cameroun (Upc), comme dans une illumination spirituelle, décrypte les énigmes du pouvoir du président Paul Biya, en jetant un regard panoramique sur le contexte et les réalités des États en Afrique. Lire en exclusivité la missive d’un nationaliste de la première heure, du haut de ses 90 ans révolus.
Je suis très content de cette Afrique-là. C’est l’Afrique de Nelson Mandela et de Desmond Tutu. C’est l’Afrique d’Alassane Dramane Ouatara, Laurent Gbagbo et Henri Konan-Bédié. C’est l’Afrique de Ruben Um Nyobe, Ahmadou Ahidjo et Paul Biya. Jacob Zuma est une fausse note. La justice de son pays l’a coincé et condamné à cause de son comportement indigne à la tête de l’Etat, comme Nicolas Sarkozi en France. Nelson Mandela et Charles de Gaule applaudissent ces décisions de justice dans leur tombe.
Le 27 juillet 2021, Abidjan a frémi de joie en Côte d’Ivoire en voyant ses dignes enfants, les présidents Ouatara et Gbagbo, s’embrasser, se congratuler et se réjouir de se retrouver en frères après d’événements malheureux qu’ils ont traversés et qu’on doit oublier pour que cela ne se reproduise plus jamais. Ce beau geste et cette belle image honorent l’Afrique et l’humanité tout entière. Cet exemple doit être imité en Algérie, en Tunisie, en Lybie, en Centrafrique, en République Démocratique du Congo, au Cameroun, en Guinée Equatoriale, au Mali, au Soudan du Sud et au Tchad.
L’ANC est en Afrique du Sud, ce que l’UPC est au Cameroun. Ces partis politiques historiques et mythiques sont des patrimoines du peuple africain. C’est fort de cela qu’en tant que patriarche et nationaliste-patriote, j’ai invité et reçu les cadres de l’UPC, toutes les tendances confondues, à Yaoundé, le 03/08/2021, en une assemblée de concertation, de réconciliation et d’action, afin de mettre un terme résolu à nos dissensions, pour construire ensemble et relever l’Ame immortel du Cameroun irraisonnablement divisée. Tous les anciens responsables de haut niveau : Onana Victor, Louka Basile, Robert Bapooh Lipot, Simon Mbila, à l’exception de Pierre Baléguel Nkot et Habiba présidente empêchés, ont répondu présent. Une déclaration consensuelle en est sortie. Elle nous renvoie à la base en vue de la préparation et de la tenue d’un unique prochain Congrès consensuel et inclusif.
Je reviens à présent sur l’actualité brûlante concernant la Guinée équatoriale et son proche voisin, le Cameroun. Deux pays frères comparables par rapport à tous les autres de notre même sous-région d’Afrique Centrale. Depuis les indépendances, les deux nations sont les plus stables et comptent parmi les plus nanties. Elles n’ont encore eu que deux présidents et entretiennent un même régime politique. Là s’arrête leur comparaison, comme l’adage dit si bien que comparaison n’est pas raison. Car le comportement d’Obiang Nguema Mbasogo est tout différent de celui de Paul Biya, comme c’était le cas entre leurs prédécesseurs Marcias Nguema et Ahmadou Ahidjo.
En Guinée équatoriale, son premier président, Francisco Marcias Nguema était un dirigeant despotique et sanguinaire. Il a instauré un climat désolant de terreur, d’horreur et de frayeur, réduisant ainsi son peuple à la tourmente et à la misère. C’était une brute sans foi ni morale. Sa chute a été brutale et la transition s’est faite dans la violence, à l’image de son règne. Son successeur est tout différent. Teodoro Obiang Nguema Mbasogo est un soldat de métier au tempérament stable et au comportement modéré.
Grâce à la manne pétrolière, il a sorti son pays de la misère en instaurant une ère de mieux-être général des populations : un véritable eldorado tropical doté d’infrastructures modernes et confortables. Mais le régime administratif et politique reste familial et monarchique avec un népotisme officiel qui fait d’un fils le vice-président de son père. Il en résulte des scandales à répétition jusqu’à l’international. La presse en rapporte certains ennuis.
C’est ainsi qu’en février 2020, la Cour d’Appel de Paris a condamné sieur Teodorin Obiang, 52 ans, vice-président de la Guinée équatoriale, à trois ans de prison avec sursis, trente millions (30 000 000 ) d’euros d’amende et la confiscation de tous ses biens saisis pour blanchiment d’abus de biens sociaux, de détournement de fonds publics et d’abus de confiance, entre 1997 et 2011. Theodorin Obiang s’est notamment constitué un parc automobile évalué à cinq millions sept cents mille (5 700 000) euros, contenant en réalité les voitures de haut luxe suivantes : trois Bugati, une Rolls-Royce et deux Maseratis.
Le 28 juillet 2021, la Cour de Cassation de Paris a prononcé contre Theodorin Obiang, une condamnation définitive portant sur les biens mal acquis évalué à cent cinquante millions (150 000 000) d’euros. Avec cette confirmation, la Guinée équatoriale devient le premier pays à bénéficier du nouveau mécanisme de restitution des avoirs frauduleusement acquis par des dirigeants étrangers adopté par le Parlement français tout récemment.
« C’est une immense victoire, une décision historique qui met un point final à 14 ans de procédure », a réagi auprès de l’AFP, Madame Sara Brimbeuf, responsable du plaidoyer « flux financiers illicites » à Transparency International, partie civile dans cette affaire : « La justice confirme que la France n’est plus une terre d’accueil pour l’argent détourné par de hauts dirigeants étrangers et leur entourage : les patrimoines acquis en France avec de l’argent sale seront confisqués et leurs propriétaires poursuivis et condamnés », a déclaré dans un communiqué Patrick Lefas, président de l’ONG en France.
Le Cameroun, c’est le pays de Ruben Um Nyobe, qui en a revendiqué la réunification et l’indépendance que la France ne voulait pas. Elle a traqué et fait assassiner notre leader nationaliste. A terme, elle s’est choisie pour créature Ahmadou Ahidjo qui proclamera le 1er janvier 1960 l’indépendance du Cameroun dont il n’avait même pas le rêve. Mais le Cameroun étant le Cameroun, le simple valet colonialiste d’Ahidjo s’est mué en un grand et puissant chef d’Etat, rigoureux, sévère, prudent et intègre. En une vingtaine d’années, il a ramené la paix au Cameroun et avec elle, la prospérité et l’aisance avec un sens élevé de considération et de dignité dont son pays a gagné l’estime et le respect du monde entier. Parmi les jeunes technocrates qu’il a formés, il s’est particulièrement attaché à Paul Biya qu’il a nommé Premier Ministre avec le droit constitutionnel de succéder au Président de la République en cas de vacance à ce poste. Grâce à cette disposition légale, la transition s’est démocratiquement opérée au Cameroun suite à la démission volontaire du président Ahidjo qui, le 06 novembre 1982, a installé à sa place Monsieur Paul Biya comme Président de la République Unie du Cameroun. A date, le nouvel homme fort du Triangle national occupe ce poste suprême avec compétence, dignité, habileté et fermeté à l’exceptionnelle chance du Cameroun, qui demeure la locomotive économique, sociale et culturelle de l’Afrique Centrale.
En comparaison avec la Guinée Equatoriale, la différence réside dans le comportement des deux leaders. D’un côté, il y a des excès. Un manque total de discernement dans l’exercice du pouvoir républicain. Une propension à un enrichissement démesuré avec des biens mal acquis. Un instinct d’accaparement, de possession et de domination. Une gestion opaque et bornée de la fortune publique dans un état primaire de jungle. Voilà ce qui fait le malheur de l’Etat Equato-guinéen. Situation impensable au Cameroun de Paul Biya dont il convient de relever la philosophie politique.
Chez Paul Biya, tout est élégance, courtoisie et retenue. Quand il accédait au sommet de l’Etat en 1982, Theodorin Obiang, le richissime équato-guinéen n’était qu’un adolescent de vingt ans. Paul Biya, reste lui, humble, effacé et intègre. Il n’a jamais mêlé sa famille propre aux affaires de l’Etat. Malgré d’abominables pressions des zélés franckistes, il refuse de précipiter son fils à sa succession, comme futur président de la République du Cameroun. Aucun de ses enfants ne jouit officiellement des faveurs de l’Etat, ni de position privilégiée au Cameroun. Ils travaillent simplement et discrètement sans se servir des fonds publics. Or, nos voisins congolais, gabonais, équato-guinéens et tchadiens sont constamment accusés coupables de népotisme, de biens mal acquis et de corruption active à la tête de l’Etat. Notre généreuse première Dame comble notre pays d’énormes œuvres caritatives et sociales de réputation mondiale. Mvoméka, le lieu de naissance de notre Président reste un village camerounais ordinaire. Il n’est branché à aucune grande route, encore moins à une autoroute. Au plan foncier, Paul Biya n’a rien de particulier au Cameroun, ni à l’étranger, alors que de pauvres types ennoblis par ses décrets se sont octroyés de villages entiers au mépris des lois et règlements en vigueur. Il ne descend pas à Genève dans un luxueux hôtel privé, mais à un hôtel public, dans un quartier ordinaire.
Fort de ces exemples pertinents, qui peut nier que Paul Biya et sa famille sont de bons modèles de conduite à suivre ? En cela seul, les Camerounais doivent s’estimer heureux et rendre grâces à Dieu de leur avoir donné un tel guide. Ce n’est pas une telle référence qu’on peut donner en pâture, ou profaner à travers de violentes manifestations d’éléments enragés et hystériques au pays ou encore moins à l’étranger. Pour Paul Biya, un chef d’Etat est un élu oint par Dieu et mis à part pour exercer la plus haute fonction d’un pays. Pour ce fils de catéchiste, ancien séminariste, l’onction reçue confère un pouvoir particulier. Un Oint n’est ni suspensible, ni révocable. Il ne peut s’écarter de sa fonction que par renonciation, comme le préconise l’Eglise catholique romaine. S.S. Benoît XVI a renoncé à sa fonction et non à la qualité pontificale. Mgr Simon Victor TONYE BAKOT a renoncé à sa fonction et non à sa qualité épiscopale qu’il conserve à vie et dans la plénitude que lui confère le sacrement de l’Ordre.
Il reste que c’est la fonction qui confère le pouvoir, et ce pouvoir-là est réel et légitime. Il ne se partage pas. Le commun des mortels ignore que le très démocratique Japon est un empire, et que son auguste empereur jouit d’une autorité et d’une considération exceptionnelles. Il est sacré et intouchable. Elizabeth II est la reine d’Angleterre. Feu son mari et sa nombreuse progéniture ne sont que des ducs et des princes. Seule son abdication qui serait comme une renonciation peut l’écarter du trône. Car seule, elle en détient le pouvoir. Voilà le caractère subversif du pouvoir que Rousseau avait qualifié de corrupteur en tranchant de façon lapidaire que « le pouvoir corrompt toujours ». Ahmadou Ahidjo l’avait appris à ses dépens en croyant que son très fidèle et humble successeur Paul Biya devenu président de la république resterait toujours sous son autorité, qui n’existait plus.
En conclusion, Paul Biya avait révélé à François Holland que ne dure pas au pouvoir celui qui veut, mais ne dure au pouvoir que celui qui peut. Sa longévité aux affaires repose sur quatre piliers qui sont : l’assiduité, la compétence, la loyauté et l’intégrité. Grâce à ces quatre piliers, il détient et exerce au Cameroun un pouvoir réel dont il n’abuse pas parce qu’il en est simplement digne. Ce pouvoir réel est l’héritage gaulliste de la Vè république française qui n’est que tropicalisé en Afrique où il tend à devenir monarchique. De Paul Biya, par rapport à tous ses homologues d’Afrique Centrale, les Camerounais doivent se réjouir et s’en féliciter.
Tribune libre du Dr S. B. Njami Nwandi
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