Dans sa chronique du 13 mai 2022, le philosophe psychopédagogue, Jean Paul Nna Mvondo, analyse l’unité des rapports entre la politique et l’ethnie au Cameroun.
La pratique politique au Cameroun serait-elle ethniciste ? Autrement dit, l’ethnie serait-elle le socle sur lequel se forge et se construit tous les mouvements politiques au Cameroun ? Peut-on gouverner en Afrique sans considérer la fibre tribale ?
Des questions lancinantes qui feraient certainement l’objet d’un large débat national. La logique aristolicienne nous enseigne la logique du tiers exclu, troisième partie d’un ensemble qui peut être incompatible avec le tout. De même l’appartenance à une ethnie est le socle de l’identification des individus par rapport à une communauté de langues et de cultures. L’activité politique ne saurait être détournée de cette réalité qui voudrait que l’on soit plus attaché à un frère personnel qu’à un demi frère sortant d’une autre tribu.
Ces considérations distinguées sont loin d’être facultatives. Car, on est mieux servi que par soi-même. Ou alors, on est plus à l’aise dans sa tribu qu’ailleurs. On ne saurait donc inventer la poudre. Lorsqu’un ressortissant du grand Nord était Président de la République, tous les comportements sociaux convergeaient vers l’affiliation à la tribu du Président en exercice. Et les gens s’en accommodaient très bien. Vint alors le tour d’un ressortissant du Sud au pouvoir, que tout le Monde attribue la paternité du pouvoir aux, Bulu, mieux au groupe ou grand ensemble Ekang BETI. Ce sont ces anomalies sociales que les sociologues et philosophes ont appelé les représentations sociales. Chaque fait de société marqué par la présence d’une communauté de personnes morales, constitue ce qu’on appelle une entité sociale juridiquement contraignante. Parler donc de justice sociale dans un environnement politique fortement « tribalisé », relèverait d’un conte de fées.
La preuve, toutes les communautés camerounaises confondues réclament ce qu’elles appellent « la part du gâteau national ». Les ressortissants de l’Ouest Cameroun le prouvent tous les jours, avec la venue du MRC en politique. Dans cette relation incestueuse « ethnie – politique », le discours sur la justice sociale trouverait la logique du tiers exclu en position. Personne ne peut aimer plus la tribu de l’autre que la sienne. Et, l’ignorance des lois aidant, c’est d’une vie sociale en autarcie dont il s’agit dans notre pays. Ne nous voilons pas la face, nous sommes consubstantiellement des tribalistes. Et ce n’est pas de l’injustice sociale que de prendre son frère en estime ou en partie, lorsqu’il est dans les problèmes. Toutes les tribus au Cameroun le feraient, non sans se foutre de nos lois existantes.
Le philosophe Jean Paul Nna Mvondo
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