Cameroun – Effondrements d’immeubles et éboulements de terrains : Les Maires coupables.


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  • 16 octobre 2023

Dans une interview inclusive accordée au poste national, le 15 octobre 2023, madame le ministre de l’habitat et du développement urbain, Célestine Ketcha Courtès, revient avec beaucoup plus de précisions, sur l’éboulement de terrain survenu le 8 octobre 2023 au quartier Mbankolo, situé dans l’arrondissement de Yaoundé 2.

Au lendemain du drame de Mbankolo, Comment le principal responsable de l’habitat et de développement urbain, au sein du gouvernement camerounais, que vous êtes, vit-il cette situation ?

C’est un drame de plus. C’est un drame de trop. Et il faut dire que c’est avec beaucoup de consternation que nous avons appris dans la nuit du 8 Octobre 2023, que cette digue avait lâché, emportant sur son chemin, prés de 17 maisons d’habitations installées sur le drain de ce cours d’eau. Et cette nuit là même, de très hautes instructions ont été données pour que le maximum de vie soient sauvées. Et pour que celles en détresses soient accompagnés, notamment en ce qui concerne leurs prises en charges sanitaires, ainsi que leurs recasements. Et cette nuit-là même, nous nous sommes organisés avec le ministère de l’administration territoriale (MINAT) ; le ministère de la Défense (MINDEF) ; et le ministère de la santé publique (MINSANTÉ). Ainsi, les équipes se sont misent à pied d’œuvre dès 20 h cette nuit-là. Il faut le dire, nous avons pris le taureau par les cornes, afin d’avoir les résultats que nous avons à présent. Sinon, le bilan aurait été beaucoup plus lourd que ça. Comme bilan, nous avons en ce moment, 28 décès, 03 disparus, 17 blessés et 57 familles impactées. Et à la suite du message de condoléances de Son Excellence Monsieur le Président de la république, Paul Biya et de son épouse Chantal Biya, aux familles si durement éprouvées, je voudrais également à la suite du gouvernement de la République, présenter mes condoléances à ces familles et un prompt rétablissement à ceux que nous avons visité à l’hôpital. C’est aussi l’occasion pour moi de saluer le corps national des sapeurs pompiers et le Forces de maintient de l’ordre (FMO), qui ont vraiment été sur le terrain dans les 10 à 15 premières minutes du drame. Je voudrai également saluer les sociétés citoyennes, que j’ai mobilisé dès 20 h, pour emmener les engins lourds que vous avez vu au four et au moulin, pour nous aider à retrouver les survivants, ainsi que les corps sous les décombres. C’était un moment très émouvant. Un moment très dur pour une maman que je suis, mais surtout pour un responsable de l’habitat que je suis également. Si nous regardons Ngouaché à Bafoussam en 2019 ; nous regardons Douala il y a quelques mois, nous regardons Ngaoundéré, nous regardons tout ce que nous vivons ces derniers temps, il y a quelque chose en commun, c’est l’occupation anarchique des sols. L’occupation des bas fonds qui représente les espaces poumons verts de la capitale Yaoundé, ou encore de nos villes. Il y a l’obstruction du passage naturel de l’eau. La direction de la météorologie avait annoncé qu’on aurait des pluies diluviennes en cette période, avec des risques d’inondations et d’éboulement de terrains. Toutes les conséquences étaient énumérées. Nous avons pris sur nous de faire un communiqué publié il y a quelques mois seulement, appellant les édiles de villes à faire libérer les drains, à curer les caniveaux avec la participation active des populations locales. Il était également question de déplacer toutes les populations installées sur les lits des cours d’eaux, vers des zones beaucoup plus sécurisées.

Madame le ministre, est-ce qu’il n’est pas urgent pour le gouvernement de passer à des actions plus fortes ?

Biensur que oui. Il faut déjà commencer par être plus ferme sur le plan administratif. Et ne pas donner les permis de bâtir aux populations sur ces zones là. Donc ce sont les maires qui sont interpelés ici au premier plan. Car, lorsqu’ils doivent délivrer un document d’urbanisme, un permis de bâtir, un permis de lotir, un permis d’implanter, il faut impérativement qu’ils descendent sur les terrains en question, pour voir sur quels sites est-ce qu’ils délivrent ces documents, qui peuvent s’avérer être à la longue des permis de tuer. Si tant est qu’il y a eu des permis de bâtir dans ces zones inconstructibles. Dieu merci, le chef de l’État a demandé l’ouverture d’une enquête, qui est d’ailleurs en cours. On verra s’il y avait des titres fonciers, ou alors s’il y avait effectivement des permis de bâtir à Mbankolo. Il faudrait dans ce sens là, que les maires répondent de leurs actes.

Qu’est-ce qui est donc difficile pour le gouvernement de sévir, madame le ministre, face à ces populations qui s’installent au niveau de ces flancs de collines et autres zones interdites ? Pourquoi c’est si difficile d’être ferme et d’agir concrètement pour protéger les vies des populations ?

Honnêtement, c’est pas facile avec les camerounais, parce qu’aujourd’hui le Chef de l’État, à travers la décentralisation ; et dans ses discours ; dit que les populations ont demandé à être autour de la table, pour la gestion de la chose publique. et ces populations sont désormais associées à travers les maires. Les maires vous disent de ne pas construire, vous vous dérobez complètement. Parce que, si c’est populations n’ont pas de permis de bâtir, ça veut tout simplement dire qu’elles ont trouvé un espace libre, elles appellent simplement leurs voisins en disant : «Ah, on a trouvé un espace libre ici». Et du jour au lendemain, elles y sont déjà installés avec femmes et enfants. Sachez qu’il n’y a pas d’espaces libres dans un Etat, dans une ville. C’est pour cela que nous le gouvernement, nous devons rester ferme. Nous avons pris l’engagement de donner au Chef de l’État un dossier complet, avec une stratégie qui visera à libérer nos zones non constructibles, notamment les bas fonds et les flancs de collines. Donc, nous avons pris sur nous de présenter et nous l’avons exprimé à Monsieur le Premier Ministre, chef du gouvernement, au cours de la réunion Ad-hoc, qu’il a convoqué avec l’ensemble des parties prenantes de ce dossier, la cartographie des zones non constructibles. Nous allons proposer des zones de récasement. Nous allons libérer ces zones, veut ou oas. Et je voudrais dire que, les recommandations que nous avons donné aux maires, ont été respectées. Nous avons demandé de recaser ; et grâce aux paquets minimum, constitué de matelas et de vivres, envoyés par le chef de l’État, la maison du parti de Nkomkana, et le site de la foire de Tsinga, ont servi pour accueillir les sinistrés, en attendant que très rapidement, comme l’a prescrit le Premier Ministre, chef du gouvernement, nous apportions des solutions beaucoup plus durables. Nous avons également pris sur nous d’élargir le lit de ces cours d’eau. En ce moment, il y a un chantier qui vise à libérer ces espaces de passage des eaux, parce que ça partira de Mbankolo, jusqu’au quartier Golf. Puisque cette eau doit bien passer par le lotissement du Golf et traverser, pour aller ressortir à Djoungolo. L’eau a son chemin qui ne doit pas faire l’objet d’obstruction. Donc nous allons poursuivre ces travaux, en collaboration avec les édiles des villes, les autorités administratives, les chefs de quartiers et les populations riveraines, pour cartographier l’ensemble des zones non constructibles. Afin de les libérer, pour faire respirer nos villes. Les jalonner avec des arbres, tel que nous l’avons proposé aux maires, afin de recommencer à reconstituer, ou à préparer notre atténuation des effets néfastes aux changement climatiques.

Nous sommes en saison des pluie et ces risques existent toujours. De quels moyens disposent votre département ministériel pour contraindre les populations à quitter ces zones à risques, ou encore ces zones non constructibles ?

Nous allons continuer à sensibiliser, non seulement les populations, parceque c’est le rôle du maire, mais nous avons pris sur nous d’accompagner ces maires, en communicant, en faisant des descentes sur le terrain, afin d’avertir ces populations, leurs dire de faire attention, les prévisions météorologiques ne jouent pas en leur faveur en ce moment. Car elles sont installées anarchiquement. Nous allons donc poursuivre notre vaste campagne de sensibilisation, à l’endroit des populations, mais aussi des édiles des villes.

Jusqu’à quand cette sensibilisation madame le ministère ?

Jusqu’à ce que les populations entendent notre voix. Parceque, ce que vous ne pouvez pas imaginer monsieur le journaliste, mes services déconcentrés m’ont informé de ce que, la voie que l’engin de la société qui nous a aider à ouvrir comme passage pour secourir les victimes de Mbankolo, un compatriote était déjà en train de rembler à ce niveau là, pour commencer ses constructions. Voilà pourquoi le Premier Ministre à prescrit de ne pas construire dans cette zone, jusqu’à nouvel avis. Donc, vous comprenez bien que nous allons continuer notre sensibilisation jusqu’à ce que nous soyons entendu sur toute l’étendue du territoire national.

Ces quatre dernières années, il y a plusieurs villes qui ont été victimes des éboulements de terrains. La question je vous la repose madame le ministre. Plus concrètement, de quels moyens disposez-vous au ministère de l’habitat et du développement urbain, pour obliger ces populations à libérer ces zones non constructibles ? Êtes-vous capable de le faire ?

C’est pas au Ministère de l’habitat d’obliger les populations à quitter ces zones à risques. Monsieur le journaliste, quand on parle déjà de populations, on parle des territoires. Pour celà, les maires doivent tout simplement arrêter de donner des permis de conduire dans ces zones. Et deuxièmement, quand un camerounais commence à construire dans ces zones, il ne faut pas attendre qu’il soit presqu’à chaînage, ou encore à la charpente, pour venir lui mettre la croix de saint André, lui demandant de demolir. Il faut déjà commencer à casser la fondation. La fermeté doit commencer au niveau local. Et nous au ministère de l’habitat, nous sommes au niveau de la stratégie nationale d’urbanisme. Néanmoins, ‘ous pouvons être sollicités pour faire des choses que les maires ne peuvent pas faire, peut-être à cause de l’importance des moyens que cela nécessite. Donc nous pensons que sur le plan des actions immédiates, il y a les maires, les autorités locales et les sous-préfets, qui font partie des commissions de délimitation. Tout le monde désormais doit veiller à protéger ces zones là.

Quel est le message que vous avez à l’endroit des populations qui sont situées dans des zones à risques, au lendemain de la célébration de la journée mondiale de l’habitat à Garoua, le 2 Octobre 2023 ?

Nous avons célébré cette année la journée mondiale de l’habitat a Garoua. Et qu’est-ce que je peux dire aux populations ? Vous vous connaissez vous-mêmes. Vous savez pertinemment que vous êtes situés dans les bas fonds, dans les zones inconstructibles, dans des zones à risques. Donc, si vous êtes installés dans ces zones en moment, vous devez les quitter au plus vite. Les grandes pluviométries, dûes aux changements climatiques sont en route. J’invite également ces populations à tourner le dos à l’incivisme ; et à adopter le respect des textes et des normes d’urbanisme en matière de construction. Je sensibilise ces populations à passer par les techniciens assermentés, par les experts en matière de construction des bâtiments, pour leurs logements. Ainsi, je les invite également à travailler de concert avec les CTDs (Collectivités territoriales décentralisées). Et j’invite également les CTDs au respect des documents de planification, pour lesquels nous avons fait des tournées de sensibilisation dans plusieurs régions du pays. Nous avons distribué gratuitement ces documents de planification, nous avons distribué également les documents d’urbanisme. Nous avons distribué la la loi sur l’urbanisme au Cameroun, avec des explications détaillées sur les opportunités que celle-ci comporte. Parce que la délivrance d’un acte d’urbanisme fait rentrer de l’argent dans les caisses de la Commune, car pour une construction il y a après tout ces documents préalables, le certificat de conformité qu’il faut délivrer, en plus des visites de chantiers qu’il faut effectuer régulièrement. Donc j’invite les CTDs, en qui le président de la République a placé toute sa confiance, à prendre pleinement leurs responsabilités. Pour avoir été moi-même, édile de ville, donc sachant ce que nous pouvons faire pour discipliner nes populations, sachant également ce que les maires peuvent faire pour faire respecter le plan d’occupation des sols, ou encore le plan secteur de leurs territoires. Il faut donc que les maires se mettent au travail. Et que ceux-ci travaillent main dans la main avec leurs populations, les autorités administratives, la société civile, de leurs circonscriptions respectives, afin de permettre que le Cameroun atteigne les objectifs de développement durable, notamment l’ODD11.

Propos recueillis par Samuel Bondjock.

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