Cameroun – Tribune libre du prêtre philosophe Jean Armel Bissi sur la culture Camerounaise et les manquements observés sur divers désirs de la perpétuer.

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Initier à la culture Camerounaise est un projet heureux mais dont le contenu est assez souvent vaniteux. En effet, notre idée de la culture africaine et surtout Camerounaise se réduit au ludique doublé d’exhibition.

On va rassembler les enfants quelque part pour leur demander de faire le défilé de modes en pagne africain, aux filles on prescrira de se natter la tête sans mèches ajoutées, aux garçons on demandera de porter des petites culottes et de se balader avec un torse nu : très souvent sans chaussures aux pieds.

Peut-être on voudra initier les jeunes filles aux menus traditionnels qu’on ne leur donne même pas le temps de bien assimiler. Très souvent, on associe les jeunes garçons aux langues du terroir dont ils ne prononcent que les syllabes sans jamais connaître le vocabulaire.

Les formateurs arriveront étant vêtus des costumes occidentaux. Les formatrices ne se passeront pas de leurs mèches artificielles et des ongles industrielles. On ne peut que se demander quelle culture croient-ils pouvoir communiquer aux plus jeunes. Ont-ils l’idée de la culture Camerounaise dont ils passent pour en être des garants ?

L’ Africain était d’abord un mystique. C’est cela qui est à communiquer aux enfants lors d’une initiation à la culture Camerounaise. La mystique africaine se passe des religions non africaines. Nous avions des cultes ancestraux dont l’efficacité n’était d’aucun doute. Lorsqu’on était malade ou stérile, nous avions des équations traditionnelles qui vous sortaient de ces ennuis. Quand il nous arrivait de manquer de réussite ou d’être sous le coup d’un malheur continu, nous avions des rituels qui ne sont plus connus de ceux qui disent être les garants de notre culture actuellement.

Ensuite, l’Africain était aussi une personne fière de son identité. Les plus convaincus de nos cultures ne sont devenus ni chrétiens ni musulmans au seul fait que cela n’est pas du ressort de leur identité culturelle. Si on n’a pas pu les dompter, c’est parce qu’ils se sont tenus loin des idéaux qui n’engageaient pas leur monde : la monogamie, l’individualisme, le mercantilisme, l’exploitation des plus faibles et des plus pauvres etc. Quand est ce que ceux qui initient à la culture Camerounaise abordent les choses sous cet angle si la culture selon eux n’est qu’ exhibition et spectacle sans aucune intériorité à faire valoir ?

L’ Africain était aussi attaché à son univers. Il avait un rapport unique à la nature de laquelle il tirait toutes ses ressources spirituelles, morales et physiques. C’est à la nature qu’il empruntait les soins grâce auxquels il tenait longtemps sur terre. Cette nature est un sanctuaire traditionnel que nous avons aujourd’hui bafoué en faisant du terrain un des commerces les plus sévères, en abusant des essences forestières que nous exploitons sans aucun souci pour ceux qui viendront après nous, en multipliant des déchets non recyclables, en enterrant des cours d’eau pour occuper leurs lits ou encore en déversant des ordures partout sans aucune attention à ce qu’est la nature : le sanctuaire des grands esprits qui protègent notre univers. Prend-on souvent le temps de le dire aux enfants lorsqu’on dit leur parler de la culture Camerounaise aujourd’hui ?

L’ Africain était surtout un homme attaché à la vie. Il protégeait la vie en plus de la transmettre à d’autres. Cela tient à une idée riche de la famille et du mariage. Nos ancêtres étaient féconds et n’avaient rien de plus précieux que leurs familles. Le lien de sang n’était donc pas fantaisiste comme on le voit aujourd’hui avec cette génération qui n’a pas le sens de l’inceste. Les parents couchent avec leurs progénitures, les oncles deviergent leurs nièces à défaut d’en abuser, les cousins vont avec leurs cousines sans aucun remords, les frères s’accouplent avec les épouses des autres au sein d’une même famille et il en nait des enfants dont les origines sont honteuses à défaut d’être indicibles. C’est aussi par souci pour la vie que nos aïeux étaient attachés aux relations hétérosexuelles. Or, notre époque est en train de faire de la sexualité un des vices les plus criards en tolérant des unions sans aucune aspiration à la procréation.

En fait, si l’idée est d’initier les enfants à la culture Camerounaise, notre souhait est que les organisateurs ne réduisent plus notre culture au ludique et au spectacle. Il y a une spiritualité africaine à véhiculer . Il existe un humanisme africain à promouvoir aujourd’hui. On doit savoir qu’il a existé chez nous des sciences efficaces, au rang desquelles notre médecine traditionnelle, qui sont à exhumer et à faire valoriser. Mgr Samuel Kleda à ce niveau en est une des plus grandes bibliothèques du moment puisqu’il guérit de la pandémie du coronavirus avec des traitements écologiques dont l’efficacité est ultra-rapide.

Abbé Jean Armel Bissi, prêtre, enseignant de philosophie, diplômé de la 59e promotion de l’Ecole Normale Supérieure de Yaoundé, licencié en droit privé et en droit public, master en philosophie (éthique et philosophie politique).

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